Henri de Monfreid

 

 

Henri de monfreid

 

 



 SÉRIES TECHNOLOGIQUES

Objet d'étude : Convaincre, persuader et délibérer.



Texte :
Henry de Monfreid : Les derniers jours de l'Arabie heureuse1, 1935. Chapitre X : "La gazelle du sultan."



[...]

Le sultan Yaya2 possédait une gazelle merveilleusement apprivoisée ; ses yeux profonds semblaient exprimer des pensées humaines et on s'attendait à chaque instant au miracle de la parole.
C'était cependant une gazelle très commune, née dans la solitude des hauts plateaux du Yémen. Un pâtre l'avait trouvée toute petite auprès de sa mère blessée et il l'avait donnée à une chèvre à la place du chevreau qu'on avait fait rôtir. Elle s'ébattait maintenant dans les jardins du sultan, se mirait avec grâce dans l'eau tranquille des bassins. À l'appel de son maître elle accourait en bonds harmonieux portée semblait-il par d'invisibles ailes.
Yaya l'avait toujours auprès de lui, couchée à ses pieds, quand il rendait la justice, et bien des fois il fut plus clément pour la détresse humaine quand le regard limpide et doux de ces grands yeux se levait sur lui.
Elle mangeait dans sa main et venait l'éveiller s'il tardait trop, lorsque résonnait l'appel de la prière. Elle le suivait en tous lieux, et prenait part à sa vie comme si réellement elle avait appartenu au monde des hommes.
En cela elle ne différait pas des autres gazelles, ses sœurs, car toutes se font aimer par la même grâce délicate. L'énigme de leurs yeux profonds trouble un peu l'homme inquiet devant le mystère, aussi imagine-t-il tout ce qui plaît à son cœur et met-il en ses pauvres bêtes si simples une âme pareille à la sienne.


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Date de dernière mise à jour : 29/07/2021

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