•Le rire est-il un vecteur de réaction et de changement ou....... Dissertation intégralement rédigée

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Le rire est-il un vecteur de réaction et de changement ou....... Dissertation intégralement rédigée

 

Depuis l'Antiquité, avec notamment les auteurs latins comme Plaute, la comédie s'est le plus souvent imposée de dépeindre une satire de la société. Horace l'a dit avec la concision de la langue latine, avec son fameux "Castigat Ridendo Mores". La comédie est, d'après Horace, un moyen de dénoncer et de discréditer certains us et coutumes déplaisants. On peut se poser la question de savoir si le rire est réellement un vecteur de réaction et de changement, ou bien si au contraire il s'agit d' une sorte d'onguent miracle qui nous cacherait les dures vérités de notre quotidien.

Tout d'abord, la comédie en général tend à discréditer une attitude, une façon de vivre, en en poussant le ridicule à son paroxysme. Molière à travers ses pièces, nous en donne le parfait exemple. Il s'attaque aux avares, comme le montre le personnage extrême d'Harpagon dans L'Avare, aux hypocondriaques, comme l'illustre Argan dans Le Malade Imaginaire, mais aussi aux pédants, dans Les Femmes Savantes ou Le Misanthrope. Qui pourrait adhérer à des points de vue si caricaturaux ? Qui oserait partager l'opinion du grotesque Géronte, qui hésite entre le salut de son fils et cinq-cent écus dans Les Fourberies de Scapin ? De même, Molière ridiculise, dans Le Tartuffe, les hypocrites et les faux dévots. En effet, l'hypocrisie et l'impiété de Tartuffe sont clairement visibles, sauf pour Orgon ("Mais par un faux éclat je vous crois ébloui." I, 5). Cette situation comique rend le spectateur complice de la famille. Orgon est si naïf et si stupide que personne ne pourrait prendre sa défense. Molière, contrairement à Corneille et à Rotrou, fait confiance à la caricature pour faire évoluer les consciences de ses comtemporains.
De plus, la comédie n'est pas, contrairement à la tragédie, réservée à un petit cercle de personnes. Les pièces de Molière sont à la fois subtiles et populaires. Par exemple, les injures d'Harpagon destinées à La Flèche, les coups de bâtons donnés par Scapin à Géronte, les servantes insolentes comme Dorine et Toinette, qui font enrager leur patron, tout ces "clichés" sont de vieilles recettes héritées de la farce médiévale. Le peuple préférant généralement les comédies aux tragédies, Molière a une portée beaucoup plus importante et peut donc remédier à des moeurs plus répandues.

Mais si le rire est un moyen de critiquer les moeurs, pourquoi ont-elles si peu changé depuis l'époque de Molière ? Il y a toujours des avares, toujours des pédants, toujours des hypocrites (plus encore même). Les comédies ne feraient-elles, à défaut de sensibiliser les masses, que les consoler pour un moment de leurs petits malheurs quotidiens en les parodiant ? En effet, le spectateur sait très bien que le théâtre n'est pas à confondre avec la réalité. Un être comme Tartuffe, aussi caricatural, aussi poussé dans l'hypocrisie, ne saurait exister. Le personnage n'est pas réaliste, pas sérieux. Et même s'il existait, sa perfidie serait immédiatement démasquée. Les comédies ne servent qu'à offrir au spectateur un sujet de moquerie, ce qui le rassure et le conforte dans l'idée qu'on peut toujours trouver plus naïf que soi. C'est le seul sentiment que la plupart des gens remportent chez eux après une comédie.
D'ailleurs, les personnages nuisibles, comme Tartuffe et Harpagon, perdent leur côté dangereux car ils sont toujours joués à la fin d'une comédie. Il suffit de voir Tartuffe emprisonné, Dom Juan damné, Géronte roué de coups. Dans une tragédie, ces personnagees inquiétants entraînent la mort du héros, et cela afflige et révolte le spectateur. Par exemple, Don Salluste, dans Ruy Blas de HUGO, entraîne le courageux valet dans la mort, et le jaloux comte de Guiche envoie Christian au front dans Cyrano de Bergerac d'Edmond Rostand. L'absence d'issue fatale dans les comédies de Molière enlève toute la gravité que la critique pourrait avoir, et le spectateur n'ira pas prendre position contre des personnages qu'on lui a montré vulnérables à la justice, divine (Dom Juan) ou royale (Tartuffe).
Pour conclure, on peut dire que, malgré les réserves qui peuvent être apportées, la citation du poète Horace "Castigat ridendo mores" est valable pour la majorité des grandes comédies. Le rire n'est-il pas "la politesse du désespoir" ? A partir du moment où l'on peut rire d'un défaut, de par son évidence ou son caractère grotesque, à partir du moment où l'on a ridiculisé une catégorie de personnes sur les planches, ces personnes, confrontés à un regard différent sur elle-mêmes, changeront dans la plupart des cas leur attitude détestable, ou deviendront la risée de tous. Mais toutes les comédies ne sont pas volontairement engagées et satiriques. Cela nous amène à une autre question : Quel est le rôle de la comédie, de nos jours ? Est-ce, comme dans l'Antiquité ou au XVIIème siècle, un moyen de critiquer la société ou bien a-t-on viré vers une autre forme de comédie, moins engagée, plus populaire (confère Francis Weber)?
 Manuel C., 2nde section internationale, lycée international de Valbonne Sophia-Antipolis (Centre international de Valbonne) ; mai 2006.





2ème devoir : Clément R.


De tout temps et dans la plupart des civilisations, la comédie fut au théâtre le principal moyen de divertissement culturel. Cependant, Horace, poète latin de l’Antiquité, et Jean de Santeul, poète français du XVIIème siècle, considéraient qu’au delà du simple divertissement, la comédie « corrige les mœurs par le rire » (« Castigat ridendo mores »). Souvent, en effet, les dramaturges choisissent d’utiliser leurs œuvres pour condamner les défauts de la société et de l’humanité sans altérer leur aspect comique. Il faut donc étudier les moyens par lesquels les auteurs de comédie renforcent leur blâme moral en faisant rire, mais aussi les moments où cette vertu éducative n’apparaît pas, et où seul le divertissement prime au mépris des valeurs.

D’une part, la comédie se met au service de la dénonciation des défauts humains. Les dramaturges utilisent leur verbe aiguisé et leur humour subtil pour exprimer leur opinion. Par exemple, dans Tartuffe, de Molière, Orgon qui s’enquiert de la situation familiale, répète quatre fois « Et Tartuffe ? […] Le pauvre homme ! » (I,4) alors que Dorine, qui l’informe insiste sur la maladie de sa femme. Ici , le comique de répétition met en évidence l’omnubilation d’Orgon par Tartuffe et le faible cas qu’il porte à des êtres qui eussent dû lui être chers. La littérature se met dès lors au service de la morale.

De plus, les auteurs comiques possèdent une arme redoutable dont ils usent volontiers dans un but argumentatif : l’ironie. Dans cette même scène 4 de l’Acte premier de Tartuffe, Dorine, après qu’Orgon eut, tel un automate, répété son attachement à Tartuffe, dit qu’ « [elle va] à Madame (Elmire) annoncer par avance la part qu’[Orgon prend] à sa convalescence ». L’ironie est flagrante, vu qu’Orgon ne porte aucune attention à sa femme, et permet d’accentuer la dénonciation de la dévote et absurde adoration du maître de maison pour l’hypocrite. De même, Dorine déclare que « Monsieur Loyal porte un air bien déloyal, » (V,4) l’onomastique ironique du personnage invitant cette antithèse qui annihile la crédibilité de l’huissier. L’ironie possède une force argumentative sans pareille et constitue souvent un facteur comique, châtiant ainsi les vices par le rire.

Enfin, l’utilisation de personnages archétypaux d’un défaut est courante pour ridiculiser et dénoncer ledit vice. Ainsi, Tartuffe est l’archétype de l’imposteur : dans la langue française, un tartuffe est une personne hypocrite. En outre, Dorine dit à Mariane : « Vous serez tartuffiée » (II,3), néologisme qui montre que Tartuffe est l’illustration presque allégorique de la manipulation et de l’imposture. Molière a souvent recours aux archétypes : Harpagon, dans l’Avare, est obsédé par l’argent au point de confondre sa cassette avec sa fille dans le célèbre quiproquo avec Valère ; Argan, dans le Malade imaginaire, est une hypocondriaque maladif tourné en ridicule par Toinette, sa servante. De même, Marivaux, dans l’Ile des esclaves, utilise deux personnages de nobles stéréotypés et les réconcilie avec leurs valets dans une harmonie qui, une fois de plus, réfute les défauts tout en divertissant.


Si la comédie permet de critiquer les mœurs de la société, elle produit parfois l’effet inverse, car l’injustice est souvent vicieusement amusante. En effet, la comédie déconsidère parfois des personnages dont la droiture et la raison bien que partielles, sont véritables. Dans Tartuffe, Madame Pernelle est rendue ridicule alors qu’elle montre parfois un bon sens, certes rigide, mais raisonné : dans la scène d’exposition, elle critique vertement chaque personnage, par exemple Dorine, qu’elle dit être « un peu trop forte en gueule, et fort impertinente, » ce qui s’avèrera exact. Cependant, l’allitération en [t] annonce la sévérité de la mère d’Orgon et la sympathie du spectateur se porte sur la servante. L’objectivité et la correction des dramaturges sont dès lors incomplètes et partiellement dicréditées, bien que le rire soit au rendez-vous.

En outre, l’efficacité et la finesse des comiques sont parfois détériorées par une certaine grossièreté issue de la farce médiévale, impliquant notamment le comique de gestes dont le pouvoir argumentatif reste à démontrer. Dans les Fourberies de Scapin, les coups de bâtons infligés à Géronte par le personnage éponyme forcent une empathie pour le vieillard bien qu’il fût désagréable, et n’apportent aucune considération morale constructive. La comédie perd alors son sens argumentatif et le divertissement ne corrige en rien les mœurs, bien au contraire.

La comédie va parfois même jusqu’à encourager des comportements immoraux. Dans les Fourberies de Scapin, le protagoniste, cherchant désespérément à échapper au courroux des deux vieillards, feint d’agoniser pour être pardonné. Ce mensonge éhonté dénote une certaine hypocrisie, bien que le stratagème soit comique. Dans l’Avare, également, Cléante, le dépensier fils d’Harpagon, et La Flèche, son malhonnête serviteur, utilisent le vol de la cassette pour déployer un chantage qui, s’il permet un dénouement heureux, ne manque pas d’être odieux. Ces personnages immoraux ne sont nullement condamnés par l’auteur, car Harpagon est le seul objet du blâme. Ainsi, la comédie est parfois immorale, et, bien qu’elle soit également divertissante, montre des aspects moins fins et moins honnêtes, à l’image de l’Homme.

En conclusion, la comédie est un genre aux multiples facettes, variant par sa finesse, sa droiture et sa capacité argumentative fluctuantes. Certes, elle corrige les mœurs par le rire mais peut aussi divertir sans punir, le théâtre étant à l’image de la société. Mais, en un sens, quel que soit le genre littéraire, toute œuvre de littérature n’est-elle pas, ou ne devrait-elle pas être, un jugement porté sur la nature, la civilisation et les sociétés humaines ?



Clément R., 2nde section internationale, lycée international de Valbonne Sophia-Antipolis (Centre international de Valbonne) ; mai 2006.




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