La Boétie, Discours de la servitude volontaire

ORAUX EAF

 

 

La Boetie, Discours de la servitude volontaire

 

 

Questionnaire sur Etienne de la Boétie

 

Quand Etienne de la Boétie est-il né?

Etienne de La Boetie est né en 1530 en France

Quand est-il mort?

Il décède à 32 ans en 1563

Comment est-il devenu célèbre?

Grâce à Montaigne qui le nomme dans ses Essais

Quelle phrase bien connue caractérise l'amitié qui liait les deux hommes?

parce que c'était lui, parce que ctait moi .

A qui les manuscrits de La Boétie ont-ils été légué à la mort de ce dernier?

A Montaigne

Quelle réflexion intéresse La Boétie?

La question de la tyrannie. Il se pose la question de savoir pourquoi les hommes acceptent la domination d'un seul, d'un tyran

 

La Boetie, Discours de la servitude volontaire

 

Questionnaire sur le Discours de la servitude volontaire

 

De quoi ce traité parle t'-il?

De la servitude volontaire de l'homme qui accepte de se laisser dominer par un tyran. La Boétie tente de comprendre les raisons qui amènent le peuple à accepter l'asservissement.

Il se pose la question de savoir si c'est par bétise, par habitude ou par corruption.

Il envisage ensuite les stuctures de la société qui rendent possible la naissance d'un tel Etat.

Quelle est la solution proposée par La Boétie?

Pour La Boétie, il suffirait de ne plus obéir ni servir le tyran pour que la tyrannie cesse

A quel moment l'extrait étudié se situe t'-il dans le discours?

Il se situe après l'exorde et concerne le rapport de force entre le tyran et le peuple asservi.

 

 

Lecture du texte

Pour le moment, je desirerais seulement qu'on me fit

comprendre comment il se peut que tant d'hommes,

tant de villes, tant de nations supportent quelquefois

tout d'un Tyran seul, qui n'a de puissance que celle

qu'on lui donne, qui n'a de pouvoir de leur nuire,

qu'autant qu'ils veulent bien l'endurer, et qui ne

pourrait leur faire aucun mal, s'ils n'aimaient mieux

tout souffrir de lui, que de le contredire. Chose

vraiment surprenante (et pourtant si commune,

qu'il faut plutot en gemir que s'en etonner) !

c'est de voir des millions de millions d'hommes,

miserablement asservis, et soumis tête baissée, a

un joug deplorable, non qu'ils y soient contraints par

une force majeure, mais parce qu'ils sont fascinés

et, pour ainsi dire, ensorcelés par le seul nom d'un

qu'ils ne devraient redouter, puisqu'il est seul, ni

cherir puisqu'il est, envers eux tous, inhumain et

cruel. Telle est pourtant la faiblesse des hommes !

Contraints a l'obeissance, obligés de temporiser,

divisés entre eux, ils ne peuvent pas toujours être

les plus forts. Si donc une nation, enchainée par la

force des armes, est soumise au pouvoir d'un seul

(comme la cite d'Athenes le fut a la domination des

trente tyrans), il ne faut pas s'etonner qu'elle serve,

mais bien déplorer sa servitude, ou plutot ne s'en

etonner, ni s'en plaindre ; supporter le malheur

avec résignation et se réserver pour une meilleure

occasion a venir.

Nous sommes ainsi faits que les communs devoirs de

l'amitie absorbent une bonne part de notre vie. Aimer

la vertu, estimer les belles actions, etre reconnaissant

des bienfaits recus, et souvent meme reduire notre

propre bien-etre pour accroitre l'honneur et l'avantage

de ceux que nous aimons et qui meritent d'être aimés ;

tout cela est très naturel. Si donc les habitants d'un

pays trouvent, parmi eux, un de ces hommes rares

qui leur ait donné des preuves reiterées d'une grande

prévoyance pour les garantir, d'une grande hardiesse

pour les defendre, d'une grande prudence pour les

gouverner ; s'ils s'habituent insensiblement a lui

obéir ; si meme ils se confient a lui jusqu'a lui accorder

une certaine suprematie, je ne sais si c'est agir avec

sagesse, que de l'oter de la ou il faisait bien, pour le

placer ou il pourra mal faire, cependant il semble tres

naturel et tres raisonnable d'avoir de la bonte pour

celui qui nous a procure tant de biens et de ne pas

craindre que le mal nous vienne de lui.

Mais o grand Dieu ! qu'est donc cela ? Comment

appellerons-nous ce vice, cet horrible vice ? N'est-ce

pas honteux, de voir un nombre infini d'hommes, non

seulement obeir, mais ramper, non pas etre gouvernés,

mais tyrannises, n'ayant ni biens, ni parents, ni

enfants, ni leur vie meme qui soient a eux ? Souffrir

les rapines, les brigandages, les cruautes, non d'une

armee, non d'une horde de barbares, contre lesquels

chacun devrait defendre sa vie au prix de tout son sang,

mais d'un seul ; non d'un Hercule ou d'un Samson,

mais d'un vrai Mirmidon souvent le plus lache, le

plus vil et le plus effemine de la nation, qui n'a jamais

flaire la poudre des batailles, mais a peine foule le

sable des tournois ; qui est inhabile, non seulement

a commander aux hommes, mais aussi a satisfaire la

moindre femmelette ! Nommerons-nous cela lachete ?

Appellerons-nous vils et couards les hommes soumis

a un tel joug ? Si deux, si trois, si quatre cedent a un

seul ; c'est etrange, mais toutefois possible ; peut-etre

avec raison, pourrait-on dire : c'est faute de coeur. Mais

si cent, si mille se laissent opprimer par un seul, dirat-

on encore que cest de la couardise, qu'ils n'osent se

prendre a lui, ou plutot que, par mepris et dedain, ils

ne veulent lui resister ? Enfin, si l'on voit non pas cent,

non pas mille, mais cent pays, mille villes, un million

d'hommes ne pas assaillir, ne pas ecraser celui qui,

sans menagement aucun, les traite tous comme autant

de serfs et d'esclaves : comment qualifierons-nous

cela ? Est-ce lachete ? Mais pour tous les vices, il est

des bornes qu'ils ne peuvent depasser. Deux hommes

et meme dix peuvent bien en craindre un, mais que

mille, un million, mille villes ne se defendent pas

contre un seul homme ! Oh ! Ce n'est pas seulement

couardise, elle ne va pas jusque-la ; de meme que la

vaillance n'exige pas qu'un seul homme escalade une

forteresse, attaque une armee, conquiere un royaume !

Quel monstrueux vice est donc celui-la que le mot de

couardise ne peut rendre, pour lequel toute expression

manque, que la nature desavoue et la langue refuse de

nommer

 

Problématiques possibles :

Comment La Boétie tente t'-il de persuader le lecteur des méfaits de la tyrannie?

En quoi ce discours est-il représentatif de l'humanisme?

Montrez en quoi ce Discours novateur s'adresse au peuple pour le persuader et le faire réagir

Plan possible pour le commentaire

I - La tyrannie : un paradoxe

II – Un discours qui s'adresse au peuple dans le but de persuader et d'indigner : Faire réagir le lecteur

III – Un texte représentatif de l'humanisme

 

 

I - La tyrannie : un paradoxe

Dans son discours La Boétie tente de persuader le lecteur et de mettre en avant le paradoxe de la tyrannie. Il s'étonne qu'un seul homme puisse réduire à la servitude des milllions d'autres. Son raisonnement est ensuite basé sur un exemple, le tyran qui assure la domination de manière temporaire en exercant un pouvoir “par la force des armes”. Sa critique du pouvoir ensuite admet une concession car il est normal de souhaiter qu'un homme dirige et ait le pouvoir. Il admet donc la suprématie mais remet en cause la nature de celle-ci. Vient ensuite la phase d'indignation : comment est-il possible qu'un seul réduise à la servitude des millions d'hommes alors qu'ils sont supérieurs en nombre, ils se laissent dominer par la force d'un seul. La Boétie situe le problème à régler = celui d'un pouvoir illégitime.

 

L'aspect paradoxal de la tyrannie se situe à ce niveau : les forces en présence sont disproportionnées, il y a le peuple donc la masse et un seul homme. Le peuple est donc plus puissant que le tyran et pourtant il est dominé ≪ tant d’hommes, tant de villes, tant de nations ≫, ainsi que le suggère la gradation ou l'effet d'insistance produit par cette phrase : ≪ si deux, si trois, si quatre ≫, ≪ si cent, si mille ≫, ≪ non pas cent, non pas mille, mais cent pays, mille villes, un million d’hommes ≫ et enfin ≪ mille, un million, mille villes ≫.

Cet aspect est donc renforcé par les gradations et hyperboles du texte, cela permet à La Boétie de bien situer le paradoxe de la tyrannie. Mais il y a un autre paradoxe car en fait le tyran n'est pas au pouvoir pour ses qualités de chef, bien plus, en fait il a plus de défauts que de qualités “hommeau”, “le plus lâche, le plus vil et le plus effeminé de la nation”. Il n'a pas les qualités d'un chef, les valeurs d'héroisme, de courage. Finalement, le tyran apparaît comme un homme médiocre et La Boétie le démasque pour laisser place à la réalité.

Quant à la servitude auxquels les millions d'hommes sont asservis, ils le sont de manière misérable. Ils acceptent un tel état de fait, “misérablement asservis”, “joug déplorable”. On retrouve le champ lexical de l'asservissement avec “servitude”, “tyrannisés”, “soumis à un tel joug”, “autant de serfs et d'esclaves”, “opprimer”. Il y a dans cet état d'esclavage, un état d'acceptation.

Questionnaire possible :

Le paradoxe de la tyrannie

Quel est le genre du texte?

Une déclamation : discours d'orientation argumentative

Quel est le raisonnement de La Boétie?

Relevez l'exemple, puis la concession utilisés dans la progression du raisonnement

A quel moment du texte se situe la phase d'indignation?

Sur quoi repose le paradoxe de la tyrannie

Quels sont les procédés littéraires utilisés pour mettre en avant ce paradoxe? Relevez les et analysez les

Quel portrait et quelle image, l'auteur donne t'-il du tyran? Citez le texte pour justifier votre réponse

Relevez le champ lexical de l'asservissement

Peut-on dire qu'il y a dans l'état d'esclavage, de servitude, un état d'acceptation? Expliquez

 

 

II – Un discours qui s'adresse au peuple dans le but de persuader et d'indigner : Faire réagir le lecteur

L'argumentation de La Boétie est très bien construite, il tente par ce discours adressé au peuple de persuader et de soulever l'indignation dans le but de faire réagir. Il interpelle le lecteur “Mais O grand Dieu! Qu'est donc cela? “, “Quel monstrueux vice est donc celui-là que le mot de couardise ne peut rendre pour lequel toute expression manque, que la nature désavoue et la langue refuse de nommer”? On peut souligner les rythmes ternaires qui scandent le texte.

Le tyran n'est pas un héros comme en témoignent les parallélismes de construction :“non d'une

armee, non d'une horde de barbares, contre lesquels

chacun devrait defendre sa vie au prix de tout son sang,

mais d'un seul ; non d'un Hercule ou d'un Samson,

mais d'un vrai Mirmidon souvent le plus lache, le

plus vil et le plus effemine de la nation, qui n'a jamais

flaire la poudre des batailles, mais a peine foule le

sable des tournois ;” Nous soulignerons “non d'une armée”, “non d'une horde”, “non d'un Hercule”, La Boétie fait preuve d'éloquence pour interpeler le lecteur et le faire réagir. Les procédés oratoires laissent transparaître la position de l'auteur qui n'est pas du côté du tyran contrairement à Machiavel. Mais pourquoi accepter cette situation de domination d'un seul sur des millions d'hommes? Le lecteur doit réfléchir à ce paradoxe.

Est-ce un vice? “cet horrible vice”? “Quel monstrueux vice”? Si on tente de comprendre la nature de cette servitude, il serait inhérent à la nature humaine, son côté sombre, un vice par lequel la nature humaine deviendrait inhumaine. Il tente de donner une portée morale à son discours. Ce ne serait pas propre à la nature humaine :

Aimer la vertu, estimer les belles actions, etre reconnaissant des bienfaits recus, et souvent meme reduire notre propre bien-etre pour accroitre l’honneur et l’avantage de ceux que nous aimons et qui meritent d’etre aimes ; tout cela est tres naturel ≫. En fait, la servitude n'est pas compatible avec la nature humaine qui doit susciter des sentiments d'honneur, de vertu, l'opprimé doit se lever contre cette servitude qui le réduit au vice de l'acceptation et de la paresse, il doit combattre pour éveiller les aspects riches de sa nature humaine car ≪ un Tyran seul, qui n’a de puissance que celle qu’on lui donne ≫. Tout repose donc sur la volonté des opprimés. Il doit retrouver sa dignité et combattre le tyran en ne lui donnant plus les moyens d'opprimer. Refuser au tyran toute puissance, ne plus lui laisser cette puissance c'est dire non à l'aliénation d'un seul homme.

Questionnaire possible :

Montrez que l'auteur tente de persuader le lecteur

Comment l'interpelle t'-il? Citez le texte

Qui est l'ennemi contre lequel il faut lutter?

Quelles sont les accusations portées contre le peuple?

Qui donne le pouvoir au tyran?

Relevez quelques rythmes ternaires et quelques parallélismes de construction : quels effets ont-ils? Justifiez et expliquez

La Boétie adhère t'-il au point de vue de Machiavel?

La Boétie tente t'-il de faire réfléchir le lecteur?

Comment la nature de la servitude est-elle expliquée?

Quelle image La Boétie donne t'-il de la nature humaine?

Est-il optimiste?

Quelle solution propose t'-il pour sortir de la servitude?

Comment sortir de la servitude?

Il faut aller vers la désobéissance passive = analogie à Gandhi

 

 

III – Un texte représentatif de l'humanisme

Ce texte est représentatif de l'humanisme. On le voit dans un premier temps car La Boétie fait un retour au textes et enseignements anciens qui ont inspiré l'auteur. Il fait des références à L'Antiquité, nous en avons un exemple historique dans la tyrannie des Trente à Athènes.

Sa réflexion à porté philosophico-politique touche à la nature humaine dont La Boétie sait tirer le meilleur car il suffit à l'homme de faire valoir sa volonté pour ne plus être asserci. Nous pouvons donc affirmer que la Boétie a une vision très optimiste et positive de la nature humaine, l'homme est au centre de son discours et de ses préoccupations morales et intellectuelles, son discours oratoire place l'homme au centre de ses questionnements : on retrouve l'optimisme du courant humaniste;

La question religieuse se traduit par celle du pouvoir. Il va de soi que le tyran n'a aucune légitimité par même de Dieu, la foi n'est pas plus analysé que cela, mais l'urgence de libérer l'homme des superstitions, autre moyen d'asservir, est présente dans le texte.

Questionnaire possible :

Montrez que ce texte est représentatif de l'humanisme et en particulier de l'humanisme politique

Montrez en quoi la vision de La Boétie concernant la nature humaine est optimiste et confiante

Quelle place est accordée à la religion?

 

Conclusion :

Au terme de notre analyse, nous pouvons dire que La Boétie dans son Discours dénonce la paradoxe de la tyrannie en mettant en place de nombreux procédés oratoires visant à interpeler le lecteur pour mieux susciter l'indignation. Mais cette réflexion sur la politique et la pouvoir d'un seul fait du Discours de La Boétie un texte représentatif de l'humanisme encore d'actualité au XXIe siècle.

Ce texte nous apprend à devenir libre par la désobéissance passive.

Questionnaire :

Que nous apprend le texte?

Quel enseignement en tirer?

 

 

 

séquence


 

Date de dernière mise à jour : 26/07/2021

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