Descartes, le modèle mathématique
LA METHODE CARTESIENNE
Le modèle mathématique
Introduction
Nous allons étudier la philosophie de Descartes, nous verrons comment le philosophe recherche dans le domaine philosophique une vérité égale à la certitude mathématique. Dans un premier temps, nous analyserons l’entreprise cartésienne et verrons en quoi elle consiste. En second lieu, nous donnerons une définition de la méthode et enfin, dans une dernière partie, nous étudierons le modèle mathématique.
En quoi consiste l'entreprise cartésienne?
L'entreprise cartésienne commence avec l'expérience d'une déception. Cette déception rend la méthode nécessaire. La description que donne Descartes de cette déception nous permet de caractériser a contrario le sens de son projet et ce qu'il attend de la philosophie. Lorsqu'il la relate en 1637, elle est si globale que rien n'en semble pouvoir réchapper. Ou que l'on se tourne, quoi qu'on considère, tout est précaire et dérisoire. «Regardant d'un œil de philosophe les différents aspects et entreprises de tous les hommes, il n'y en a quasi aucune qui ne me semble vaine et inutile». L'exil volontaire de Descartes eut pour but de maintenir ce regard de philosophe qu'il portait sur l'existence. Il s'éloigne pour se maintenir en cet éloignement qu'est la philosophie. Ce qu'il fuit en s'exilant c'est cet ordinaire divertissement et cette accoutumance par lesquels nous venons à ne plus même remarquer la futilité de nos occupations ni éprouver l'inanité de notre vie. Ce regard philosophique exprime donc certaines exigences originaires de la pensée cartésienne. Si l'on élucide pourquoi les diverses actions et entreprises de tous les hommes apparaissent vaines et inutiles au regard d'un philosophe, on aura caractérisé négativement ce que Descartes attend de la philosophie et en quoi elle est la seule occupation que le philosophe qualifie de bonne et d'importante. Les seules entreprises considérées ici sont scientifiques manifestant ainsi que les seuls vrais biens sont ceux que notre industrie nous procure immanquablement parce que notre science nous en instruit nécessairement. Pour n'être ni vaines, ni inutiles, il faut que nos occupations nous procurent l'efficacité de nos actions par la seule rectitude de notre jugement et que la véracité de notre jugement ne dépende que du libre usage de notre volonté. Ce qui n'a pas été jugé en vérité n'est qu'inutilement fait.
Définition de la méthode
Nous donnerons à la méthode la définition suivante : «On appelle méthode, l'ordre que la pensée doit suivre pour parvenir à la sagesse. C'est un parfait usage de l'esprit». Descartes affirme qu'il n'y a pas tant de perfection dans les ouvrages composés de plusieurs pièces et faits de la main de divers maîtres qu'en eux auxquels un seul travaillé. Le philosophe est désireux de composer une géométrie dont il avait conçu l'idée, c'était son projet promis à son ami Beeckman. Mais en cherchant les fondements de cette science, il conçoit l'idée de l'unité du corps des sciences et tente de la constituer. Il souhaite reconstruire le corps des sciences. C'est son dessein.
Le modèle mathématique, un modèle d'évidence
Le modèle mathématique devient un modèle d'évidence, de clarté et de distinction, or ce qui est conçu clairement et distinctement ne peut être faux, donc le modèle de l'évidence mathématique est un modèle de vérité. Il faut habituer l'esprit à penser selon le modèle mathématique. Les mathématiques servent de modèles épistémologiques. La certitude de leurs raisons et de leurs conclusions est un fait logique exemplaire qui nous marque ce que nous devons exiger en toutes les sciences. C'est un modèle de certitude tel que «ceux qui cherchent le droit chemin de la vérité ne devront s'occuper de rien qui ne puisse être l'objet d'une certitude égale à celle des démonstrations d'arithmétique et de géométrie», nous dit Descartes dans les Regulae II. Ce n'est pas de leur objet que les mathématiques reçoivent leur exemplaire certitude mais des principes et de l'ordre selon lesquels elles l'élucident. Ce n'est pas parce qu'ils sont géomètres que les bons géomètres raisonnent avec certitude c'est parce qu'ils raisonnent bien qu'ils progressent avec certitude de leur science. Les mêmes causes produisent les mêmes effets, il suffit donc de transporter sur d'autres objets le même mode de raisonnement pour avoir la même certitude en quelque science. La certitude du raisonnement est indépendante de l'objet, elle ne peut résulter que de sa forme donc de ses règles. Les règles sont nécessaires à la certitude du raisonnement. Les mathématiques et les autres sciences sont rendues semblables par la communauté de leur démarche ou de leur raisonnement, c'est-à-dire, de leur méthode.
Le cartésianisme méthodologique
L’unité des sciences nous tourne vers l’idée d’un ordre unique des connaissances analogue à l’ordre mathématique. La certitude des mathématiques est d’ordre universel. Dans l’unité de l’esprit, la connaissance est sagesse suprême. Mais le monde est fait d’une même et unique matière de sorte que la physique, l’astronomie et la biologie doivent obéir aux mêmes règles. Dans la méthode, les règles doivent être certaines et faciles permettant d’aboutir à la connaissance vraie de tout ce dont on est capable. Il faut éviter l’erreur, le philosophe est animé par la volonté de parvenir à tout ce qui est clair, (idée claire, toute idée qui se manifeste par l’intuition), et distinct, (ce qui nous est saisissable, possibilité de séparer une idée d’une autre). Afin de ne pas sombrer dans l’erreur, il ne faut pas se fier aux préjugés, éviter la précipitation, ce qui est susceptible de ne pas nous amener aux idées claires et distinctes et qui serait douteux. Il faut en outre découvrir la vérité. Par les règles de l’analyse, « diviser les difficultés, les examiner en autant de parcelles possibles afin de les mieux résoudre », les règles de la synthèse, « conduire par ordre mes pensées en commençant par les plus simples et les plus aisées à connaitre pour remonter peu à peu, jusqu’à la connaissance des plus composées ». Vient ensuite le dénombrement, « faire partout des dénombrements si entiers et des revues si générales que je fusse assuré de ne rien omettre ». Les trois notions dominantes permettant de découvrir la vérité par le biais de la synthèse, de l’analyse et du dénombrement sont, l’intuition, l’induction, ce qui permet de passer d’un terme à un autre en s’apercevant, par intuition de leur rapport, et l’ordre, complexe, ordonné, c’est le but final de la science cartésienne, du cartésianisme méthodologique.
Date de dernière mise à jour : 16/05/2019