Camus, l'Etranger, le procès

 

   
   

ORAUX EAF

 

 

L'Etranger d'Albert Camus

 

Questionnaire sur Albert Camus :

*** Camus :

1 -

Quand Albert Camus est-il né?

Albert Camus est né le 7 novembre 1913 à Mondovi en Algérie

2 -

Quand est-il décédé?

Il est  mort le 4 janvier 1960 à Villeblevin dans l'Yonne

3 -

Qui est Camus?

C' est un écrivain  dramaturge, essayiste et philosophe français.

4 -

Quel est le thème dominant de l'ensemble de son oeuvre?

Il a développé dans son œuvre très diverse un humanisme fondé sur la prise de conscience de l'absurdité de la condition humaine.

5 -

A t'-il reçu le prix Nobel de littérature en 1957?

Il a reçu le prix Nobel de littérature en 1957.

6 -

Citez trois de ses oeuvres

Il est l’auteur de l’étranger, la chute, le mythe de Sisyphe

7 -

Quand commence t'-il son travail sur le "cycle de l'absurde"?

– À partir de 1940, début de son travail sur le « cycle de l’absurde » (L’Étranger, roman, Le Mythe de Sisyphe, essai, et Caligula, théâtre) : face à une existence dont ils ne perçoivent pas le sens, les héros de Camus s’enfoncent dans l’indifférence et ne croient en rien.

8 -

Quand Camus s'installe t'-il à Oran?

Il s’installe en 1941 à Oran, et commence à recueillir des documents sur la peste. Il s’engage dans la Résistance en 1944 (travaille au journal clandestin Combat).

9 -

Le roman "la Peste" connait-il un grand succès?

– 1947 : publication de La Peste qui remporte un grand succès. On y voit une allégorie de la France sous l’Occupation (dans une lettre à Barthes, Camus affirme que son roman a «comme contenu évident la lutte européenne contre le nazisme»).

10 -

Quand publie t'-il l'Homme révolté?

– 1951 : publication  de L’Homme révolté, qui constitue le dernier volet d’un « cycle de la révolte », avec La Peste et L’État de siège. L’homme – dont le docteur Rieux est l’archétype – appartient à une collectivité dont il lui faut partager les luttes.

Ce second cycle exalte la solidarité humaine face au mal, ce qui montre l’évolution de la pensée de Camus.

11 -

De quoi Camus décède t'-il?

– 1960 : Camus meurt dans un accident de voiture

12 -

Quel roman inachevé laisse t'-il à sa mort?

il laisse inachevé un roman autobiographique, Le Premier Homme.

 

Questionnaire sur  l'Etranger : Meursault ou la révolte lucide

1 -

Quand le roman, l'Etranger est-il paru?

En 1942

2-

Dans quel cycle ce roman s'inscrit-il?

Dans le "cycle de l'absurde" : philosophie de Camus

3 -

Quels ouvrages cette tétralogie comprend t'-elle?

Le Mythe de Sisyphe, Caligula, le Malentendu

4 -

Ce roman a t'-il fait l'objet d'une adaptation cinématographique?

Oui une adaptation cinématographique a été réalisée par Luchino Visconti en 1967.

5-

Quelle phrase tirée de l'Etranger est l'une des plus célèbre dans la littérature contemporaine?

« Aujourd'hui, maman est morte. »

6 -

De quelle nature la narration de Meursault est-elle?

Il fait le plus souvent l'inventaire de ses actes et de ses désirs du moment, la narration s'apparente en ce sens à celle d'un journal intime. Il n'y a pas d'analyse de ses pensées ou de ses actes dans la première partie du roman. Elle change dans la seconde partie et  ressemble davantage à un récit qu'à un journal intime

7 -

Est-il représentatif de l'homme absurde du Mythe de Sisyphe? Meursault est-il un héros absurde?

Oui, il est représentatif de l'homme absurde du Mythe de Sisyphe. Inspiré par la mythologie grecque, Camus fait le rapprochement entre la vie comme un éternel recommencement obéissant à l'absurde, et Sisyphe, héros de la mythologie grecque. Le héros absurde fait face à l'absurdité de la vie. Le héros absurde est un archétype de l'absurdité Camus entend montrer que la révolte est le seul moyen de vivre sa vie dans un monde absurde

Le fait de « vivre le supplice de Sisyphe » signifie que l’on vit une situation absurde répétitive dont on ne voit jamais la fin ou l’aboutissement.

8-

Meursault est-il déshumanisé?

Oui, le lecteur ne connaît ni  son prénom et son nom l'apparente à un personnage secondaire car il est peu employé tout au long du roman.

9 -

Camus a t'-il transposé sur un plan romanesque la dimension absurde du Mythe de Sisyphe? Justifiez votre réponse

Oui on peut parler d'une transposition de la théorie du Mythe de Sisyphe sur le plan romanesque; Camus cherche à montrer que l'existence n'a pas de sens et que l'homme est victime d'une sorte de fatalité. C'est pourquoi dans L'Etranger, les évènements s'enchaînent et Meursault en fait une sorte d'inventaire sans analyse et sans s'investir.

10 -

Quel épisode de l'Etranger nous montre que Meursault est le jouet de la fatalité?

L'épisode où il tue l'arabe mais il n'est pas pour autant présenter comme un meurtrier. C'est un simple jouet du soleil et de la lumière qui le pousse à tuer. La situation est d'autant plus tragique qu'il  n'a pas son destin en mains, cela renforce la dimension tragique.  Les responsables indirects seraient la lumière et le soleil qui sont omniprésents dans le roman de Camus.

11 -

Meursault devient-il l'homme révolté? Pourquoi ? Expliquez la pensée de Camus

Meursault devient l’homme révolté  « Le contraire du suicidé, écrit Camus dans Le Mythe de Sisyphe, c’est le condamné à mort », car le suicidé renonce, alors que le condamné se révolte.

Refusant le suicide, Camus propose trois genres :

  • Le héros absurde fait face à l'absurdité de la vie comme  Don Juan en recherchant toujours cette première passion de femme en femme.
  • Le suicidaire qui renonce
  • Le croyant qui cherche un sens à la vie hors de la vie elle-même

 la révolte est le seul moyen de vivre sa vie dans un monde absurde = solution proposée par Camus.

 « Je tire ainsi de l’absurde trois conséquences qui sont ma révolte, ma liberté et ma passion. Par le seul jeu de la conscience, je transforme en règle de vie ce qui était invitation à la mort — et je refuse le suicide. »  Camus

12 - Le procès : la découverte de l'absurde

A quel moment, Meursault découvre t'-il l'absurde? Quand est-il lucide?

Au départ, Meursault vit sa vie comme un éternel recommencement sans se poser de questions dans la plus grande indifférence. Il n'a aucune conscience de l'absurde et reste prisonnier de son meurtre.

Meursault découvre l'absurdité de son rapport au monde au moment du procès. Il s'élève à la lucidité du sort de l'existence humaine, il se rend compte qu'il est condamné à mort, il rejette l'hypothèse religieuse, l'idée d'un Dieu qui guiderait l'homme. A ce moment, le héros est seul face à son destin, il n'a plus d'espoir et il est lucide de  « cette confrontation entre l'appel humain (le désir de vie) et le silence déraisonnable du monde (ce que Meursault appelle "la tendre indifférence du monde"  ) » (Camus). « je m'ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde. ... ». L'absurde au moment du procès, Meursault en a conscience et à la fin du roman, cette lucidité l'enfermera dans la plus grande des solitudes. Le monde absurde c'est le monde quotidien mais déchargé de sa signification, débarassé de ses conventions, codes et lois. Il se différencie, vit son indifférence et devient une menace pour les valeurs du monde quotidien et pour autrui

 

Questionnaire sur la séquence " roman ":

 

  • Le roman et ses personnages : visions de l'homme et du monde, série de questions
  • 1. Donner une définition du roman.
  •  Le roman est, au XIIème siècle, un récit en vers français. A partir du XIVème siècle, le roman renvoie à des textes en prose. Selon son sens moderne, le roman est une « œuvre d’imagination en prose, assez longue, qui présente et fait vivre dans un milieu des personnages donnés comme réels, nous fait connaître leur psychologie, leur destin, leurs aventures. »
  • 2. Quelles sont les différentes formes du roman ?
  •  Le roman de chevalerie et les fabliaux (de petites histoires en vers simples et amusants) au Moyen-âge
  •  Le roman comique au XVIIème
  •  Le roman épistolaire et le roman picaresque (dont le héros est un aventurier ou un vaurien) au XVIIIème
  •  Le roman historique, le roman de mœurs, le roman d’aventures, et le roman fantastique au XIXème
  •  Le roman policier, le roman de science-fiction, le roman analyse et le « nouveau roman » au XXème.
  • 3. Quelles sont les interrogations romanesques essentielles ?
  •  La passion amoureuse
  •  L’apprentissage du monde et la découverte du réel
  •  Le jeu de la mémoire et du temps
  •  L’interrogation devant la condition humaine.
  • 4. Quelles sont les fonctions du roman ?
  •  La fonction ludique (se divertir, s’évader, s’identifier…)
  •  La fonction didactique :
  • o le roman comme connaissance du monde (roman historique, roman social, roman témoignage…)
  • o Le roman comme connaissance de l’homme
  • o Le roman comme leçon (le roman engagé, la morale)
  • o Le roman comme interrogation
  • 5. Donner des exemples de romans à fonction didactique?.
  • Romans didactiques : Les lettres persannes de Montesquieu Les liaisons dangereuses de Laclos Le rouge et el noir de Stendhal
  • 6. Qu’est-ce que le schéma actantiel ?
  •  Le schéma actantiel s’applique parfois parfaitement à l’intrigue, et pour certaines œuvre, il ne coïncide que partiellement avec l’action. Les personnages principaux, qui ont une place importante dans le déroulement du récit (parmi eux, le héros) sont classés en deux catégories qui s’opposent :
  • o Les personnages adjuvants, qui aident le héros dans sa quête (de même, peuvent être adjuvants des objets, des évènements…)
  • o Les personnages opposants, qui sont en conflit avec le héros, et tentent de le mettre en échec.
  •  Le héros, entourés des personnages principaux, subit une épreuve principale avant d’atteindre son but.
  • 7. Comment la caractérisation des personnages est-elle réalisée ?
  •  Elle est directe pour les descriptions, les renseignements explicites sur l’identité du personnage
  •  Elle est indirecte quand il s’agit de déduire les traits de la personnalité du héros, de son comportement, ou ses paroles.
  •  On appelle « effet personnage » l’illusion de réalité que donne le roman, le lecteur assemblant mentalement au fil du récit des éléments dispersés qui construisent peu à peu le personnage. Pourtant, celui-ci n’est rien au départ.
  • 8. Quelles sont les fonctions des personnages dans un roman ? Représentation : le portrait des personnages donne au lecteur l’image d’une réalité.
  •  Symbole : Le personnage symbolise souvent toute une catégorie de personnes, il dépasse les perspectives individuelles.
  •  Interprétation : c’est à travers le personnage que se construit le sens du récit.
  •  Identification : les comportements d’un personnage peuvent influencer le lecteur qui a tendance à s’identifier à lui.
  •  Esthétique : il existe un art de la composition du personnage, et de le créer au fil du récit.
  •  Information : Le personnage transmet des indices, des valeurs au lecteur.
  • 9. Qu’est-ce qu’un héros ?
  •  Le personnage principal d'un roman est la personne sur laquelle sont fondée toute l'action, et toute la cohérence de l'histoire contée. Dans notre langage quotidien, nous appelons toujours le personnage principal le héros de l'histoire ; or le véritable héros est l'individu qui parvient à vaincre les difficultés et à régler les problèmes par l'intermédiaire de sa force, son pouvoir ou son intelligence. Les vrais héros de romans vivent de multiples aventures racontées dans de nombreux ouvrages, ils ont déjà des capacités ou des facultés particulières qui autorisent ces aventures. Le mot « héros » désigne à l’origine, un demi-dieu, qui accomplie des exploits, et incarne le courage et des valeurs moral. Cependant, il existe des personnages principaux appelés des antihéros.
  • 10. Qu’est-ce qu’un antihéros ?
  •  On peut distinguer quatre types principaux d’antihéros:
  • o le personnage « sans qualités », l’être ordinaire vivant une vie ordinaire dans un cadre ordinaire
  • o le héros « décalé », un personnage ordinaire, sans qualités, qui par les circonstances se trouve plongé dans une situation extraordinaire.
  • o le héros négatif, porteur de valeurs antihéroïques et en général antisociales, mais sans qualités « héroïques ».
  • o le héros déceptif, un personnage ayant potentiellement des qualités héroïques mais qui n’en fait pas usage ou les utilise mal ou à mauvais escient, ou qui tend à perdre ces qualités, ou enfin qui se trouve dans un cadre où ces qualités ne sont plus appréciées ou admises.
  • 11. Quelles sont les différents types de héros, et leurs caractéristiques ?
  •  Au XVIIème siècle, prédominent les héros raffinés des romans précieux, les héros joyeux des romans comiques, et les héros parfaits du roman classique.
  •  Au XVIIIème siècle, on assiste à la naissance du héros de roman moderne, avec les personnages entreprenants du réalisme, les héros hédonistes du roman libertin, les héros philosophes du roman des lumières, les héros sensibles des romans du courant pré-romantique.
  •  Au XIXème, le personnage idéalisé du roman romantique apparaît, ainsi que le héro moderne des romans réalistes, et le héro expérimental du roman naturaliste.
  •  Au XXème siècle, on retourne à des personnages forts (vers les années 30), ce sont des héros engagés, aux prises avec les conflits de leur temps. Dans les années 50, les personnages dans le nouveau roman sont remis en question, par exemple en rendant le personnage principal anonyme, ou en ne se focalisant pas sur un personnage principal.
  • 12. Qu’est –ce que la focalisation ?
  •  Pour raconter une histoire, on doit choisir un point de vue, la focalisation : le romancier décide qui perçoit les événements rapportés. (le mot « focalisation » est issu du vocabulaire photographique : c’est le foyer à partir duquel une photo est prise.
  • 13. Quels sont les différents points de vue utilisés dans un roman ?
  •  Le point de vue externe = perception « du dehors », sans connaître les pensées des personnages.
  •  Le point de vue interne = perception d’un seul personnage, dont on suit les pensées, les sensations.
  •  Le point de vue omniscient (ou focalisation zéro) = perception de l’ensemble des sentiments et des sensations de tous les personnages, ainsi que du passé et de l’avenir.
  • 14. Qu’est-ce que les modalités du récit ? Quelles sont-elles dans un roman ?
  •  Le temps romanesque n’est pas linéaire comme le temps réel : le récit peut accélérer ou ralentir l’action, revenir en arrière, s’arrêter brusquement. Les personnages ont dans le roman une vie plus ou moins complète, certains ne font que des apparitions épisodiques, la façon dont ils s’inscrivent dans le temps peut donc être importante dans l’étude du roman. Ce sont ces « effets » que l’on appelle modalités.
  •  La scène : durée du récit = vie du personnage. (Elle est calquée sur les évènements.)
  •  La pause :  (Comme son nom l’indique, c’est un arrêt du déroulement des évènements.)
  •  Le sommaire : . (Les évènements sont énumérés ou résumés.)
  •  Analepse : c’est un retour en arrière (qui provoque une pause dans le récit. Le temps n’avance plus, mais des renseignements qui font avancer le récit sont dévoilés.)
  •  Prolepse : anticipation du futur
  •  Ellipse : passage sous silence d’une période plus ou moins longue.
  •  Modalité itérative : action répétée une seule fois.
  • 15. Quelle est la structure du récit dans le roman ?
  •  Le récit romanesque est composé de :
  • o La situation initiale : définit le cadre de l'intrigue, met en place le lieu, l'époque, les personnages... le héros vit une situation d’équilibre.
  • o L’élément perturbateur : C'est l'élément qui fait basculer la situation du début, remet en cause l'état initial: rencontre, découverte, événement inattendu...
  • o Les péripéties : c’est une suite de transformations qui modifie la situation des personnages.
  • o L’élément de résolution : il annonce la résolution de l’intrigue. C’est le dénouement.
  • o La situation finale : Le personnage principal trouve une nouvelle situation d'équilibre, sur laquelle s’achève le roman/le récit.
  •  Ce modèle, à l'origine de toute invention narrative, peut être plus ou moins modifié; certaines étapes peuvent être difficiles à reconnaître, ou leur ordre changé. Mais retrouver et analyser ce schéma permet d'enrichir l'étude du roman.

 

 

DEFINITION DU ROMAN:

Les origines du roman sont liées à la langue romane et à l’affirmation de la langue française. Issus de l’épopée en vers, les premiers romans évoquent le monde de la chevalerie.

Le genre du roman adopte progressivement ses caractéristiques narratives. Mais il est longtemps considéré comme un genre mineur. C’est au XIXème siècle, reconnu comme l’âge d’or du roman, qu’il acquiert ses lettres de noblesse, au moment où la bourgeoisie affirme ses codes dans la société.

Le roman met toujours en scène un ou plusieurs individus qui cherchent à s’intégrer dans la société.

Le XXème siècle voit la remise en cause des codes traditionnels du roman, en particulier dans ce que l’on a appelé le nouveau roman.

Le roman, souvent inclassable, admet toutefois différentes catégories : le roman de chevalerie, le roman libertin, le roman épistolaire, le roman historique, le roman naturaliste, le roman d’initiation, le roman policier… reconnaissables à la structure narrative développée.

 

Questionnaire sur le passage à présenter à l'oral :


Lecture de l'extrait à présenter à l'oral

Extrait du chapitre 4 (2ème partie) “La plaidoirie de l’avocat” : une caricature de la justice.

L'après-midi, les grands ventilateurs brassaient toujours l'air épais de la salle et les petits éventails multicolores des jurés s'agitaient tous dans le même sens. La plaidoirie de mon avocat me semblait ne devoir jamais finir. A un moment donné, cependant, je l'ai écouté parce qu'il disait: "Il est vrai que j'ai tué". Puis il a continué sur ce ton, disant  "je" chaque fois qu'il parlait de moi. J'étais très étonné. Je me suis penché vers un gendarme et je lui ai demandé pourquoi. Il m'a dit de me taire et, après un moment, il a ajouté: "Tous les avocats font ça." Moi, j'ai pensé que c'était m'écarter encore de l'affaire, me réduire à zéro et, en un certain sens, se substituer à moi. Mais je crois que j'étais déjà très loin de cette salle d'audience. D'ailleurs, mon avocat m'a semblé ridicule. Il a plaidé la provocation très rapidement et puis lui aussi a parlé de mon âme. Mais il m'a paru qu'il avait beaucoup moins de talent que le procureur. "Moi aussi, a-t-il dit, je me suis penché sur cette âme, mais, contrairement à l'éminent représentant du ministère public, j'ai trouvé quelque chose et je puis dire que j'y ai lu à livre ouvert." II y avait lu que j'étais un honnête homme, un travailleur régulier, infatigable, fidèle à la maison qui l'employait, aimé de tous et compatissant aux misères d'autrui. Pour lui, j'étais un fils modèle qui avait soutenu sa mère aussi longtemps qu'il l'avait pu. Finalement j'avais espéré qu'une maison de retraite donnerait à la vieille femme le confort que mes moyens ne me permettaient pas de lui procurer. "Je m'étonne, messieurs, a-t-il ajouté, qu'on ait mené si grand bruit autour de cet asile. Car enfin, s'il fallait donner une preuve de l'utilité et de la grandeur de ces institutions, il faudrait bien dire que c'est l'Etat lui-même qui les subventionne." Seulement, il n'a pas parlé de l'enterrement et j'ai senti que cela manquait dans sa plaidoirie. Mais à cause de toutes ces longues phrases, de toutes ces journées et ces heures interminables pendant lesquelles on avait parlé de mon âme, j'ai eu l'impression que tout devenait comme une eau incolore où je trouvais le vertige. A la fin, je me souviens seulement que, de la rue et à travers tout l'espace des salles et des prétoires, pendant que mon avocat continuait à parler, la trompette d'un marchand de glace a résonné jusqu'à moi. J'ai été assailli des souvenirs d'une vie qui ne m'appartenait plus, mais où j'avais trouvé les plus pauvres et les plus tenaces de mes joies: des odeurs d'été, le quartier que j'aimais, un certain ciel du soir, le rire et les robes de Marie. Tout ce que je faisais d'inutile en ce lieu m'est alors remonté à la gorge et je n'ai eu qu'une hâte, c'est qu'on en finisse et que je retrouve ma cellule avec le sommeil. C'est à peine si j'ai entendu mon avocat s'écrier, pour finir, que les jurés ne voudraient pas envoyer à la mort un travailleur honnête perdu par une minute d'égarement, et demander les circonstances atténuantes pour un crime dont je traînais déjà, comme le plus sûr de mes châtiments, le remords éternel. La cour a suspendu l'audience et l'avocat s'est assis d'un air épuisé. Mais ses collègues sont venus vers lui pour lui serrer la main. J'ai entendu: "Magnifique, mon cher." L'un d'eux m'a même pris à témoin: "Hein?" m'a-t-il dit. J'ai acquiescé, mais mon compliment n'était pas sincère, parce que j'étais trop fatigué.

 

Questionnaire sur le passage à présenter à l'oral en fonction des axes d'étude

Questionnaire sur l'introduction

1 -

Sur quels épisodes la première partie du roman est-elle centrée?

Sur l'enterrement de la mère de Meursault et le récit du meurtre de l'arabe

2 -

Comment la narration était-elle dans cette première partie?

- Récit au jour le jour avec une narration qui  efface toute distance avec l'histoire

3 -

Qu'en est-il dans la seconde partie du roman?

Il y a recul par rapport aux faits racontés : la narration est postérieure aux "onze mois qu'a duré cette instruction"

4 -

Le lecteur a t'-il a présent connaissance des pensées du personnage?

Oui, le lecteur est également amené à partager le point de vue de Meursault

5 -

Où se situe l'extrait à étudier?

Fin du chapitre 4, 2ème partie.

6 -

Situez le passage en quelques mots

Après avoir longuement rapporté les propos du procureur axés sur l'attitude de Meursault à la mort  de sa mère, le narrateur rapporte la plaidoirie de son avocat.

  • Problématiques possibles à l'oral :
  • Comment à travers l'état psychologique de Meursault, peut se lire une critique de la justice?
  • Quelle est la fonction de cet épisode?
  • En quoi le procès est-il une représentation théâtrale de l'absurde?
  • En quoi ce texte propose t'-il une vision satirique de la justice?

 

  • Plan possible :
  • I - Un accusé étranger à son propre procès
  • A - les marques de ce regard extérieur
  • B - la manière de rapporter les évènements
  • II - Une satire de la justice
  • - Le langage judiciaire
  • - Le spectacle judiciare
  • III - Les raisons d'un malaise et son évolution
  • A - L'incompatibilité entre Meursault et le système judiciaire
  • B - L'éveil d'une sensibilité

 

Questionnaire sur le passage

  • I -
  • Un accusé étranger à son propre procès
  • A -
  • les marques de ce regard extérieur

 

 1 -

Montrez que Meursault porte un regard distancié sur ce qui l'entoure

- Ses impressions sont approximatives "sembler", "je crois", "m'a paru", "très étonné"

2 -

Manifeste t'-il de l'intérêt pour la plaidoirie?

Non, il ne manifeste aucun intérêt.

- Il n'en rapporte que des bribes, résume le plus souvent, fait des ellipses.

- Il évoque régulièrement sa lassitude, la longueur du temps, son incompréhension, voire son indifférence.

- Il désire fuir ou se réfugier dans la solitude du sommeil.

3 -

Eprouve t'-il rapidement un sentiment d'exclusion?

- Emploi de la première personne par son avocat : cela fait naître un sentiment de dépossession. On parle à la place de Meursault et il n'existe plus.

- on le fait taire lorsqu'il pose des questions

- Il est réduit à un objet

4 -

Comment le regard extérieur est-il renforcé?

Par la manière de rapporter les évènements.

 

  • I -
  • Un accusé étranger à son propre procès
  • B -
  • la manière de rapporter les évènements

 

1 -

Comment les évènements sont-ils rapportés?

Il y a opposition du monologue intérieur de Meursault et le discours extérieur de l'avocat.

Il y a une dualité entre Moi/ les Autres sur la base d'une opposition : dualité révélatrice de l'étrangeté de Meursault : "Il disait", "Moi je", "Pour l ui".

La présence des différents discours, direct, indirect et indirect libre dans le compte rendu de la plaidoirie de l'avocat par Meursault renforce encore le regard extérieur du personnage tout en rapportant les évènements.

2 -

Que traduit le discours direct?

- Met le lecteur dans les conditions réelles du procès

- Faire un portrait de l'avocat

- Renvoyer aux temps forts de l'argumentation

3 -

Que traduit le discours indirect?

- Estomper l'énonciateur = l'avocat en ne conservant que ses paroles

- Résumer ce qui est dit

4 -

Que traduit le discours indirect libre?

- De faire entendre simultanément deux voix, celle de l'avocat et l'opinion que s'en fait Meursault

- D'insinuer la réserve de Meursault par rapport à l'exagération des propos et des intentions qu'il suppose.

5 -

Que permettent ces différentes façons de rapporter les faits?

- Varier le rythme des paroles rapportées

- Mettre en avant la naiveté de Meursault = procédé littéraire que l'on retrouve dans Candide : faire découvrir le réel par un étranger qui porte un regard neuf.

 

  • II -
  • Une satire de la justice
  • - Le langage judiciaire

 

1 -

Montrez que la critique de la justice passe par une critique du langage judiciaire

- Il y a des procédés impersonnels : "Emploi du je " qui produit sur Meursault l'inverse de l'effet recherché. Il se sent écarté.

- Le langage judiciaire utilise aussi des images faciles. L'image du livre ouvert est banalisée par Meursault dans sa reprise au discours indirect : banalité renforcée par l'accumulation de formules toutes faites. L'utilisation du discours indirect donne le sentiment que ces propos stéréotypés pourraient se rapporter à n'importe qui.

- Discours creux : phrases formelles : Camus suggère que le discours judiciaire n'est que la manipulation oratoire sans rapport avec le réel. Celui qui l'emporte n'est pas celui qui dit la vérité mais celui qui parle le mieux.

 

  • II -
  • Une satire de la justice
  • - Le spectacle judiciare

 

1 -

Comment le procès apparaît-il?

Comme un spectacle mis en scène, un rituel où chacun joue un rôle comme un acteur.

2 -

Relevez les éléments évocateurs du spectacle judiciaire

- Le décor initial : "grands ventilateurs..." "petits éventails multicolores..."

- L'évocation de l'avocat :

  • Meursault parle de son "talent". Joue moins bien que le promeneur, il oublie les détails de son texte.
  • Il prend finalement un "air épuisé"
  • Il a son public qui le félicite pour sa prestation. On juge sur la forme non le fond.
  • Même pris à témoin, il devient spectateur de son propre procès. On semble oublier qu'il risque sa vie.

 

  • III -
  • Les raisons d'un malaise et son évolution
  • A -
  • L'incompatibilité entre Meursault et le système judiciaire

 

1 -

Comment  se manifeste l'incompatibilité entre Meursault et le système judiciaire?

Se matérialise par un malaise physique = sensation d'étouffement et de fatigue.

- S'explique par son besoin de vérité :

  • Il cherche à rendre compte du déroulement des faits avec exactitude : abondance des indices temporels
  • Il a un grand souci de nuance : "me semblait", "je crois", "il m'a paru", "j'ai senti"... : expressions caractériques de son honnêteté et de sa sincérité.
  • Meursault est étranger à la justice qui est fausse et artificielle.

 

  • III -
  • Les raisons d'un malaise et son évolution
  • B -
  • L'éveil d'une sensibilité

 

1 -

Montrez qu'il y a éveil d'une sensibilité

Meursault prend conscience de ce qui est vrai, cela lui procure une émotion nouvelle en contraste avec le faux, le vide du procès.

- L'émotion se rapporte à un passé révolu. Il prend conscience de la valeur de la vie au moment même où il en est exclu.

- Bonheur fait de sensations, auditives, olfactives....

- Bonheur associé à des joies quotidiennes : le vrai bonheur est à la fois simple et tragique : on ne le reconnaît que lorsqu'il est perdu = traduction poétique de la beauté du monde.

Paradoxalement, c'est alors qu'li est en prison que Meursault s'éveille au lyrisme, libère ses émotions, alors que dans la vie libre il apparaissait enfermé en lui-même. Plus il se détache du monde, plus il devient libre.

Conclusion :

1 -

En quoi cet extrait est-il doublement significatif?

- Visée satirique, voire polémique : montrez l'impuissance de la machine judiciaire à saisir la réalité et la personne sous le personnage avec juste milieu. conventions et artifices dominent.

Si Meursault est condamné c'est parce qu'l refuse le masque. Aux yeux d'une société théâtrale, il est un monstre dont il faut se débarasser car son refus d'adopter les conventions (Pleurer à l'enterrement de sa mère par exemple ) met en danger l'ordre de l'édifice social dont le procureur ou l'avocat sont les représentants.

- Passage représentatif de l'évolution psychologique du personnage. Personnage étranger aux conventions qui refuse d'entrer dans le jeu.

- Mais, un homme réconcilié avec la vie.  Meursault reprend en effet possession de lui -même, il reconnaît les vraies valeurs, s'ouvre à la sensibilité. C'est lorsqu'il perd sa liberté physique qu'il accède à la liberté intérieure.

 

 

 
   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Date de dernière mise à jour : 17/05/2019

Les commentaires sont clôturés