Lecture en ligne : Montaigne, les Essais, Livre I, XXVIII, De l'amitié

 

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Bac en ligne :  De l'amitié, Les Essais, livre I, XXVIII

*** Document 

** Toutes séries : bac de français

 

Descriptif :

Le document fait trois pages word police 12, il comprend une introduction, trois parties développées avec chacune plusieurs arguments, des transitions, une conclusion et une ouverture. L'étude proposée est d'un bon niveau

Montaigne, commentaire du Livre I, XXVIII, De l'amitié

les genres de l'argumentation, questions sur textes

  • Montaigne, les Essais, livre 1, XXVIII
  • "au demeurant... ni qui fut ou tien ou mien"
  • De l'amitié

problématiques possibles  :

  • en quoi peut on parler d'une autobiographie au service de l'argumentation?
  • en quoi est ce un texte argumentatif?

Plan de l'étude

  • I - La distinction entre une amitié véritable et de simples relations
  • II - Le tableau touchant d'une union fusionnelle
  • III - Une rencontre soumise à une nécessité qui dépasse le discours

 

Lecture en ligne du commentaire :

 

Etude : « De l’amitié », Essais I, XXVII, (1580-1595) Montaigne

 

Introduction:

Les essais de Montaigne, écrit depuis son domaine ou il s’est retiré de 1570 à sa mort (1592), est un ouvrage riche et même touffu, qui suit le cours des lectures et réflexions de l’auteur. Il crée ainsi un genre nouveau, libre, qui traite de sujet variés sans prétendre en épuiser la matière de l’auteur. Faire « l’essai », c’est a la fois pour Montaigne mettre a l’épreuve de son jugement( il fait « l’essai »de) devant ses expériences de vie et de pensée mais c’est également essayer au sens de tenter avec modestie, de rendre compte du cheminement de ses réflexions pour lui-même et ses proches. L’extrait du livre I, « de l’amitié », que nous allons étudier analyse avec autant de sincérité que de finesse les liens profonds qui ont unis l’auteur et Etienne de la Boétie, cinq ans plus tard. Montaigne distingue d’abord cette amitié sincère de simples « accointances, puis il brosse le tableau touchant d’une union entre les deux hommes, enfin il élève leur rencontre au range d’une nécessité »fatale » difficile à exprimer.

I_ La distinction entre une amitié véritable et de simples relations

1. Discours argumentatif de l’essai =définir les termes

Délimiter des notions « ce que nous appelons » vs « de quoi je parle ». Montaigne met en garde contre l’usage abusif des termes « amis et amitiés » = volontés de clarifier les notions. Le titre « de l’amitié » ne s’intéresse qu’à l seconde de ces deux notions.

2. Définition par opposition:

d’une part les « accointances et familiarités », de l’autre l’amitié véritable dont il est question: « l’amitié de quoi je parle »

- les raisons pour les relations(« accointances) sont de l’ordre de l’ intérêt: « nouées par quelque occasion ou commodité » = peuvent s’expliquer.

Vs. L’amitié n’a pas d’autre justification qu’elle-même: parallélisme « parce que + tournure restrictive « cela ne se peut exprimer qu’en répondant »parce que c’était lui; parce que c’était moi. »

-les « accointances » sont lentes à se solidifier « amitiés molles et régulières…conversation »

NB: vocabulaire évaluatif péjoratif « molles », « tant que » = marque de subjectivité( jugement de l’auteur tant= trop) +sonorité désagréable.

Vs. Soudaineté de l’amitié pour la Boétie dont tous deux se justifient: « il excuse et explique » (car s’en étonnent) Justification= « elle n’avait point de temps à perdre » + allitération en [p] : « précipitation promptement- parvenue- perfection » = vocabulaire mélioratif cette fois.

 

II_ Le tableau touchant d’une union fusionnelle

1. Tableau touchant d’une amitié vécue :

Pas seulement d’un discours th dorique et argumentatif, mais aussi la description d’une expérience personnelle et affective: liberté du genre de l’essai qui mêle réflexion et vécu.

- Modalisateurs de la subjectivité: « je crois », « je sens », présence forte de la premier personne « je, me, moi, mienne »

- mention elliptique d’un ami en particulier (la réflexion sur l’amitié n’est pas maintenue dans la généralité): « il « , référence à ses écrits « une satire latine excellente qui est publiée », aux circonstance de leur rencontre « en une grande fête et réunion de ville » référence à leur age « nous étions tous deux hommes faits « : ancrage dans le vécu personnel de Montaigne.

- champ lexical de l’affection très présent, évocation de sentiments forts et tendres « je l’aimais- union - affection- embrassions- (+ adverbe d’intensité = subjectivité+rythme ternaire = insistance) si pri, si liés, si connus- (superlatif) rien dés lors ne nous fut si proche que l’un à l’autre - notre intelligence »

Appel aux sentiments, engagement personnel et affectif(=> touche le lecteur)

2. Union fusionnelle :

plus que de simples liens entre deux personnes distinctes, Montaigne va jusqu’à faire entendre que les deux amis se sont unis: « (nos âmes)…se mêlent et se confondent l’une en l’autre d’un mélange si universel ». Métaphore très expressive de cette fusion où les deux êtres ne se distinguent plus l’un de l’autre « elles (nos âmes) ne retrouvent plus la couture qui les a jouîntes »: seule la figue poétique peut exprimer l’union exceptionnelle de l’amitié selon Montaigne.

L’amitié est un dépassement de l’individualité, fusion des âmes dans la réciprocité répétition de « mélange » (l.4 et l.21), métaphore de la liquidité, dissolution de l’individu + parallélisme « …qui, ayant saisi ma volonté, l’amena se plonger et se perdre dans la sienne qui, ayant saisi ma volonté, l’amena se plonger et se perdre en la mienne », réciprocité complète soulignée par les structures parallèles et le vocabulaire « pareille ». Symétrie rigoureuse entre la première et la troisième personne et insistance sur la perte de soi « perdre » répété et souligné « je dis perdre, la vérité, ne nous réservant rien qui nous fût propre, ni qui fût ou sien ou mien » = dissolution de l’ordre du soi (être) aussi bien que de l’avoir: fusion totale= « mélange si universel ». Notion d’altérité abolie.

 

III_ une rencontre soumise à une nécessité qui dépasse le discours, une « force inexplicable et fatale »

1. La nature inexplicable de cette amitié.

Difficulté à trouver les mots justes: répétition « je ne sais quelle » + lexique => exprime cette difficulté à cerner la nature de l’amitié « je ne sais quelle inexplicable » , « je ne sais quelle quintessence de tout ce mélange ».Pourtant, Montaigne recherche la vérité, pacte de sincérité (Cf. Préface des Essais: veut se peindre « tout nu »):

- « au-delà de tout mon discours » => au-delà de la compréhension logique, intellectuelle, au-delà de ce que le langage permet de saisir, il y a « une force…médiatrice », dépasse l’entendement.

2. L’origine inexplicable de cette amitié:

- contrairement aux « accointances »(l.2) l’amitié semble sans raison, sans justification, ne se forge pas selon les besoins et les intérêts. L’origine de cette attirance réciproque est intriquer à la nature des deux êtres: « parce que c’était lui parce que c’était moi ».parallélisme souligne la correspondance évidente entre « lui » et « moi », à la même place, superposition syntaxique parfaite, de fait sans autre argument.

-rapidité foudroyante ( comme un coup de foudre) de leur amitié ne peut s’expliquer par une rencontre fortuite, bien que Montaigne le prétende un instant « par hasard »: seule la première rencontre est due aux circonstances, mais elle était en fait préparé par un nécessité qui ne se laisse pas expliquer.

3. « Une force…fatale »

Forme de prédestination à cette amitié « nous nous cherchions avant que de nous êtres vus », Montaigne et La Boétie tous deux prévenus en faveur de l’un de l’autre « par des rapports…qui faisaient plus d’effort que ne porte la raison des rapports » càd sans se connaître déjà une mystérieuse attirance les portait a priori l’un vers l’autre. Nouvelle métaphore pour exprimer le caractère étonnant de cette amitié spontanée « nous nous embrassions par nos noms ».

-cette amitié rapide parce qu ’ « elle n’avait point à perdre de temps » (mort prématurée de La Boétie): comme si toute leur amitié avait déjà était prévue, le cours en était écrit Conception d’une vie soumise à l destinée

- expression de la nécessité »fatale - quelque ordonnance du ciel » = dimension spirituelle de cette amitié.

 

Conclusion

« De l’amitié » expose les réflexions que Montaigne a forgées à partir de l’expérience personnelle de son amitié avec La Boétie. Le texte est à la fois un texte argumentatif qui cherche à définir la notion d’ amitié et un récit autobiographique touchant, bien que succinct, où l’auteur partage avec le lecteur ses sentiments profonds. L’amitié y est peinte avec une honnêteté qui n’exclut pas un fort engagement affectif, révélant un point de vue tout à a fait original L’amitié est pour la fusion complète et peut -être prédestinée de deux âmes.

En effet « l’essais » est bien pour Montaigne le lieu d’expression de son parcours intime et privé, car pour lui « chaque homme…porte en soi la forme entière de l’humaine condition »et c’est au prix de sa sincérité qu’il peut d’exprimer, malgré les limites de la pensée et du langage, une vérité universelle.

Date de dernière mise à jour : 20/08/2017