Epreuve commune, bac 2010, français, séries générales, séquence poésie

 

DNBAC

 

 

  • Examen blanc
  • épreuve commune (janvier 2010) : sujet + corrigés
  • Objet d’étude : la poésie

 

  • Corpus
  • Document A Charles Baudelaire, “L’Albatros“
  • Document B René Daumal, “Les dernières paroles du poète“
  • Document C Paul Éluard, Conférence prononcée à Londres, le 24 juin 1936 (extrait)
  • Document D Louis Aragon, “le Discours à la première personne“ (extrait)

Corpus de textes :

    • Document A « L’Albatros »
    • Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage
    • Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
    • Qui suivent, indolents (¹) compagnons de voyage,
    • Le navire glissant sur les gouffres amers.
    • À peine les ont-ils déposés sur les planches,
    • Que ces rois de l’azur, maladroits et honteux,
    • Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
    • Comme des avirons traîner à côté d’eux.
    • Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
    • Lui, naguère si beau, qu’il est comique et laid !
    • L’un agace son bec avec un brûle-gueule (²),
    • L’autre mime, en boitant, l’infirme, qui volait !
    • Le Poète est semblable au prince des nuées
    • Qui hante la tempête et se rit de l’archer ;
    • Exilé sur le sol au milieu des huées,
    • Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.
    • Charles Baudelaire, “L’albatros”, Les Fleurs du Mal, Spleen et Idéal, 1857.
    • 1. Indolent : nonchalant
    • 2. Brûle-gueule : pipe
    • Document B « Les dernières paroles du poète »
  • Et le poète, dans sa prison, se frappait la tête aux murs. Le bruit de tambour étouffé, le tam-tam funèbre de sa tête contre le mur fut son avant-dernière chanson.
  • Toute la nuit il essaya de s’arracher du cœur le mot imprononçable. Mais le mot grossissait dans sa poitrine et l’étouffait et lui montait dans la gorge et tournait toujours dans sa tête comme un lion en cage.
  • Il se répétait :
  • « De toute façon je serai pendu à l’aube. »
  • Et il recommençait le tam-tam sourd de sa tête contre le mur. Puis il essayait encore :
  • « Il n’y aurait qu’un mot à dire. Mais ce serait trop simple. Ils diraient :
  • - Nous savons déjà. Pendez, pendez ce radoteur. »
  • Ou bien ils diraient :
  • - Il veut nous arracher à la paix de nos cœurs, à notre seul refuge en ces temps de malheur. Il veut mettre le doute déchirant dans nos têtes, alors que le fouet de l’envahisseur nous déchire déjà la peau. Ce ne sont pas des paroles de paix, ce ne sont pas des paroles faciles à entendre. Pendez, pendez ce malfaiteur !
  • Et de toute façon je serai pendu.
  • Que leur dirai-je ?
  • On entendit des bruits de baïonnettes et d’éperons. Le délai accordé prenait fin. Sur son cou le poète sentit le chatouillement du chanvre et au creux de l’estomac la patte griffue de la mort. Et alors, au dernier moment, la parole éclata par sa bouche vociférant :
  • « Aux armes ! À vos fourches, à vos couteaux,
  • à vos cailloux, à vos marteaux
  • vous êtes mille, vous êtes forts,
  • délivrez-vous, délivrez-moi !
  • je veux vivre, vivez avec moi !
  • tuez à coups de faux, tuez à coups de pierre !
  • Faites que je vive et moi, je vous ferai retrouver la parole ! »
  • Mais ce fut son premier et dernier poème.
  • Le peuple était déjà bien trop terrorisé.
  • Et pour avoir trop balancé pendant sa vie, le poète se balance encore après sa mort.
  • Sous ses pieds les petits mangeurs de pourriture guettent cette charogne qui mûrit à la branche. Au-dessus de sa tête tourne son dernier cri, qui n’a personne où se poser.
  • (Car c’est souvent le sort - ou le tort - des poètes de parler trop tard ou trop tôt.)
  • René Daumal, “Les dernières paroles du poète”, extrait final, Le Contre-ciel, 1936

 

    • Document C Extrait d’une conférence prononcée à Londres, le 24 juin 1936.
  • Depuis plus de cent ans, les poètes sont descendus des sommets sur lesquels ils se croyaient. Ils sont allés dans les rues, ils ont insulté leurs maîtres, ils n’ont plus de dieux, ils osent embrasser la beauté et l’amour sur la bouche, ils ont appris les chants de révolte de la foule malheureuse et sans se rebuter, essaient de lui apprendre les leurs.
  • Peu leur importent les sarcasmes et les rires, ils y sont habitués, mais ils ont maintenant l’assurance de parler pour tous. Ils ont leur conscience pour eux.
  • Paul Éluard, L’Évidence poétique, 1937

 

    • Document D “Le discours à la première personne” (extrait)
  • […] J’aurais tant voulu vous aider
  • Vous qui semblez autres moi-même
  • Mais les mots qu’au vent noir je sème
  • Qui sait si vous les entendez
  • Tout se perd et rien ne vous touche
  • Ni mes paroles ni mes mains
  • Et vous passez votre chemin
  • Sans savoir ce que dit ma bouche
  • Votre enfer est pourtant le mien
  • Nous vivons sous le même règne
  • Et lorsque vous saignez je saigne
  • Et je meurs dans vos mêmes liens
  • Quelle heure est-il quel temps fait-il
  • J’aurais tant aimé cependant
  • Gagner pour vous pour moi perdant
  • Avoir été peut-être utile
  • C’est un rêve modeste et fou
  • Il aurait mieux valu le taire
  • Vous me mettrez avec en terre
  • Comme une étoile au fond d’un trou
  • Louis Aragon, “Le discours à la première personne”, section 3, Les Poètes, 1960. (Gallimard, Paris 1969)

 

  • Question préalable (4 points)
  • Caractérisez en les comparant les figures du poète imaginées dans les quatre textes du corpus. Votre réponse n’excèdera pas une vingtaine de lignes

 

  • Commentaire :
  • Document B « Les dernières paroles du poète » René Daumal

 

  • Rappel du sujet de l'écriture d'invention :
  • imaginez un dialogue entre le poète baudelairien et un des “hommes d’équipage” représentant une société sourde à la poésie.

 

  • Sujet de la dissertation:
  • Est-il juste de penser, comme le dit Éluard, que les poètes “parlent pour tous” ?

 

Correction de l'épreuve commune : préparation du bac blanc

 

 

 

 

 

Date de dernière mise à jour : 28/07/2021

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